LES PROPRIÉTAIRES DE LA FERME DANMARC N’ONT JAMAIS MANQUÉ D’AMBITION ET ILS N’ONT JAMAIS LÉSINÉ NON PLUS SUR LES TECHNOLOGIES POUR PROGRESSER.

Les propriétaires de la Ferme Danmarc, située à Bécancour, ne craignent pas les gros chiffres. Avec 3200 truies, l’entreprise est une des plus importantes maternités du Québec. On pourrait même dire que la croissance est un leitmotiv pour Jean-Claude Parr et Maurice Tourigny, deux associés de longue date qui, dans les années 1990, ont diversifié leurs activités de produc­tion de volaille pour se lancer dans l’exploitation d’une maternité porcine. Depuis 2014, le gérant des porcheries, Pascal Lavigne, et son frère Jean-Fran­çois sont également devenus actionnaires de la Ferme Danmarc.

L’exploitation avait atteint la capa­cité maximale permise en 2012, soit 2400 truies. Au chapitre de la produc­tivité, elle a produit 70 000 porcelets en 2019. Le rehaussement des normes en 2020 a permis aux actionnaires d’augmenter leur capacité à 3200 ani­maux. La ferme possède également 45 ha (110 acres) de terre en culture et 14 000 poules pondeuses. Pour sa main-d’œuvre, elle mise sur des travailleurs étrangers depuis 2014. En plus de deux travailleurs québécois d’expérience, elle compte, depuis 2019, sur l’apport de neuf travailleurs guatémaltèques.

UNE ANNÉE DE TRANSITION

L’année 2020 n’a pas été de tout repos. Elle a débuté avec le syndrome reproducteur et respiratoire porcin (SRRP), qui s’est infiltré dans une des fermes en janvier, ce qui a mené à une quarantaine des ani­maux. Le mois suivant, l’agrandissement prévu d’une des porcheries pour hausser le nombre de truies a dû être retardé : une partie du bâtiment en chantier s’est effondré, soufflé par les forts vents qui ont balayé la région. Et comme les malheurs n’arrivent jamais seuls, la COVID-19 s’est invitée au printemps, affectant tous les employés, y compris les frères Lavigne.

Les rendements prévus à la hausse avec l’agrandissement de la ferme se sont fait attendre en raison de ces imprévus. Le taux de reproduction, qui se situait à 28,38 porcelets par truie en 2020, a reculé l’année suivante, surtout à cause de la fermeture du troupeau à la suite du SRRP, mais une gestion serrée a mené à un redressement. En novembre 2021, le taux de reproduction était de 27,3, et Pascal entrevoyait un chiffre de 28 en décembre 2021. Pour 2022, il croit possible d’atteindre les 30 porcelets par truie.

LA TECHNOLOGIE AU SERVICE DES ANIMAUX

L’agrandissement de 2020 a aussi mené à plusieurs remises en question et change­ments dans l’environnement des truies.

Lors du premier agrandissement, en 2012, les actionnaires ont choisi des robots de fabrication européenne pour le système d’alimentation, ou distributeur automatique de concentrés (DAC), soit ce qui se faisait de mieux à l’époque.

Pour les travaux entrepris en 2020, l’équipe a appliqué la même philosophie, en cherchant le nec plus ultra du marché. Il s’agit d’un système dit « de réfectoire », qui permet aux truies d’entrer dans des cages d’alimentation et d’en sortir à leur gré. Selon les observations de Pascal et des travailleurs, la majorité des truies passent la journée dans ces cages.

Pour ce qui est des DAC datant de 2012 (au ratio de 1 DAC pour 60 truies), la ferme a pris la décision de les remplacer par le système Gestal 3G, développé par l’entreprise québécoise Jyga Technolo­gies (au ratio de 1 DAC pour 15 truies). « L’alimentation est une source de stress », explique Pascal. En favorisant un meilleur accès à l’alimentation, et donc en rédui­sant le stress, on favorise la gestation des truies ainsi qu’une meilleure mise bas.

Le fait d’avoir choisi une société qué­bécoise s’est accompagné de plusieurs points positifs, qui n’avaient pas néces­sairement été pris en compte dans le choix, mais qui se sont avérés précieux par la suite. Cela a facilité de beaucoup non seulement l’installation, mais aussi la compréhension du fonctionnement des équipements – sans oublier le suivi en cas de pépins. Avec un équipementier euro­péen, la distance et le décalage horaire s’étaient fait sentir à la longue, malgré la qualité des produits. Pascal a pu poser toutes les questions qu’il voulait durant l’installation, et en cas de doute, les représentants ne sont pas loin. «J’essaie de contrôler tout ce qui est possible en ce qui concerne la gestion des animaux.»

LES CLÉS DU SUCCÈS

Pascal ne tarit pas d’éloges sur les Gua­témaltèques à l’œuvre dans les porche­ries. « Ce sont des gens de la terre, qui sont habitués à ce genre de travail. » Ils saisissent rapidement les consignes, ont du cœur à l’ouvrage et travaillent dans la bonne humeur, le tout au son de la musique de leur pays. « Tout le monde s’aide. » Aimer son travail est davantage qu’un plus : c’est une condition de succès, estime le gérant de ferme. « Il faut avoir du fun », ajoute Pascal.

De bons employés constituent d’ail­leurs ce qu’il considère comme un des trois éléments expliquant la réussite de l’entreprise. L’équipement est une autre clé importante, tout comme une bonne alimentation, basée sur une moulée de qualité.

Pascal se remet aussi en question, ajoute Jean-François Blais, expert-conseil au Regroupement Porcin des Deux Rives (RP2R) *. « Il pose beaucoup de questions », note Jean-François. « Je me demande tou­jours ce que je pourrais faire de mieux », ajoute Pascal.

L’engagement de l’entreprise dans des technologies innovantes explique également qu’elle se démarque, avance Jean-François Blais. « Dans leur cas, utili­ser des équipements à la fine pointe de la technologie n’est pas juste une façon de faire. » Il donne comme exemple le smaRt Counting. Il s’agit d’une invention québé­coise qui compte les cochons à l’aide d’une caméra installée dans un corridor lorsqu’ils traversent la zone de comptage prédéfinie. Le compte est disponible en temps réel, et les résultats des séances de comptage sont accessibles via une application Web. « Cela facilite grandement le décompte aux sevrages », explique Jean-François Blais.

POUR 2022

Après deux années tumultueuses, les propriétaires de la Ferme Dan­marc visent à renouer avec les buts fixés lors de l’agrandissement. Rehausser la production au-delà des niveaux de 2020 figure donc dans leurs priorités, et les derniers chiffres montrent qu’ils sont sur la bonne voie. Et comme la main-d’œuvre compte parmi leurs critères de succès, ils souhaitent aussi stabiliser au mieux les employés de la ferme, ce qui n’est pas une mince tâche actuellement avec les délais d’immigration pour les travailleurs étrangers temporaires. L’équipe de Danmarc compte aussi tout mettre en oeuvre pour préserver le troupeau des virus tels que celui causant la diarrhée épidémique porcine, qui a sévi au Québec dans un passé pas si lointain.

Si le passé est garant de l’avenir, nul doute que les frères Lavigne réussiront à atteindre leurs objectifs.

 

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Auteure

Céline Normandin